Arts de la divination en Afrique
Jacques Barrier
Le médecin traditionnel est une personnalité majeure du village, souvent à la fois un devin (diagnosticien) et un guérisseur (thérapeute). Dans certaines ethnies les fonctions sont séparées, plus ou moins associées. Ici, nous allons insister sur le rôle du devin.
Les rituels de divination sont ou ont été pratiqués chez la plupart des peuples africains. La divination a pu être autant un art élaboré et complexe qu’une pratique quasi quotidienne. Il est clair que la demande divinatoire régresse dans un grande partie des populations du fait des nécessités du monde moderne.
Les raisons du succès de la divination et de la voyance en Afrique sont connues. En Afrique noire, le hasard n’existe pas ; la maladie est par essence la conséquence d’un déséquilibre de forces au sein de la communauté. L’individu sain ou malade a sa propre force vitale en tant qu’être physique et spirituel dans son contexte social. Le devin a lui aussi une force singulière, un dynamisme vital qui l’amène à voir l’invisible au delà des apparences, à identifier les rapports de force, notamment les forces positives et négatives, le bien et le mal chez les autres. C’est un privilège et on dit que le nganga douala a la double vue (de Rosny) ou la tête « percée » pour les Béti et les Fang (Laburthe-Tolra). Il “voit” l’environnement de la famille – on devrait dire la famille élargie , le lignage donc les ancêtres. Cette quête de responsabilité s’intéressera aussi à la communauté, au village de résidence avec ses notables et les modes d’autorité, aux relations notamment amicales et professionnelles, aux concessions et villages alentours. Les “nœuds” sont les tensions et les conflits existants. Nous avons vu que le but est d’identifier le fait ou l’individu responsable. Les forces négatives notamment l’attaque de sorcellerie sont parfois évoquées. Ailleurs, s’agit-il de l’influence néfaste d’esprits ou de génies? Au pire, le « mal » peut être dû à un esprit malin descendu du monde occulte de la magie. Les esprits peuvent se situer dans le village lui-même, dans la brousse ou dans un espace spirituel – ou sacré – correspondant à ce que certains seraient tentés d’appeler Dieu , les déités ou les génies. On pourra notamment distinguer une faute personnelle, une intention malveillante ou un mécontentement ou des intentions néfastes des ancêtres. Un interdit a-t-il été transgressé ? Identifier et nommer la maladie sont des processus complexes puisque les maux sont directement liés à une problématique sociale visible ou invisible. Enfin, le problème d’un individu concerne souvent toute la communauté qui se sentira impliquée dans la tragédie (M-N Anderson).
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